Christophe Riou, le coach qui murmurait à l’oreille des moutons
- Aurélya Bilard
- 4 mars
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 16 mars
Christophe Riou, coach professionnel, s’est intéressé de près à l’éthologie, c’est-à-dire au comportement des animaux. Il a lancé « Leadersheep », une expérience immersive qui permet aux équipes de prendre conscience de leur dynamique interne grâce à des exercices réalisés avec des moutons. N’allez pas croire que le coach compare les collaborateurs à des ovidés. Que nenni. Il confronte surtout les collaborateurs à un environnement VICA, volatile, incertain, complexe et ambigu. Explications !

Comment est née votre activité de coaching « Leadersheep », l’accompagnement des équipes au moyen d’un troupeau de moutons ?
Christophe Riou : Après avoir été dirigeant de PME dans l’industrie pendant une vingtaine d’années, je suis devenu coach il y a quinze ans. Assez naturellement, j’ai commencé à accompagner l’animal que je connaissais le mieux, à savoir le manager (rires). Tout d’abord, de manière traditionnelle, c’est-à-dire « dans les murs ». Puis, il y a cinq ans, j’ai développé une activité de coaching « hors les murs » avec entre autres un programme en itinérance pour aider le dirigeant sur ses réflexions stratégiques. Puis, il y a deux ans, j’ai réfléchi à une nouvelle approche afin d’accompagner cette fois-ci les équipes. J’avais envie de faire bouger les lignes en adoptant un format qui diffère du traditionnel powerpoint projeté en salle. Car au bout du compte, les collaborateurs ne retiennent pas grand-chose de ce genre de séminaire. Je me suis questionné et c’est comme ça que j’ai eu l’idée de mettre le système équipe au contact d’un autre système vivant, le troupeau de moutons.
Dans l’imaginaire collectif, le mouton n’a pas une bonne réputation. « Suivre comme un mouton de Panurge » est une expression péjorative par exemple. Est-ce que vous rencontrez des obstacles par rapport à ça ?
C. R. : Oui, parfois, la première réaction de certains est de croire que je compare les collaborateurs à des moutons. Or, ce n’est pas du tout le cas ! Je le dis souvent, il y a deux coachs dans cette aventure : le coach que je suis et le troupeau. Les équipes vont comprendre énormément de choses par rapport à leur dynamique grâce aux comportements imprévisibles des moutons.

L’équicoaching - avec les chevaux - est assez médiatisé depuis quelques années. Pourquoi avez-vous choisi de vous tourner vers les moutons ?
C. R. : Je me suis intéressé aux moutons parce qu’ils fonctionnent en troupeau et qu’il s’agit de la parfaite métaphore de l’environnement - économique, politique, réglementaire, concurrentiel… - auquel sont confrontées les équipes dans le milieu professionnel. En effet, on évolue dans un monde VICA, volatile, incertain, complexe et ambigu. Il y a là un effet miroir avec le troupeau.
Les moutons sont volatiles : en une fraction de seconde, ils peuvent passer d’un coin du pré à un autre, sans crier gare.
Ils sont incertains : impossible de prédire leur trajectoire, vous pensez les guider à droite, ils s’élancent à gauche.
Le troupeau est complexe : il n’obéit à aucune règle pré-établie, chaque mouvement résulte d’interactions invisibles mais bien réelles.
Enfin, leur comportement est ambigu : en tant qu’animaux de proie, ils oscillent entre prudence instinctive et réactions soudaines, rendant toute anticipation hasardeuse.
Comment se passe l’activité ? Qu’apprennent les participant•es ?
C. R. : J’accompagne des groupes de 6 à 12 personnes dans un pré que je limite volontairement à quelque 1 500 mètres carrés. Je les confronte à plusieurs exercices : amener le troupeau d’un point A à un point B, le séparer en deux, le faire passer entre des piquets, le faire slalomer, le déplacer puis le maintenir à l’arrêt quelques minutes, etc. Sur le papier, ça semble très simple. Dans les faits, c’est bien plus compliqué. Car les moutons se comportent comme bon leur semble.
En face, on a une équipe, qui elle, est rarement coordonnée. Les exercices révèlent toutes les failles d’organisation, de préparation, de communication qui existent au sein du collectif. Soit parce que la stratégie a été mal définie, soit parce qu’une fois la stratégie déployée et ne fonctionnant pas comme voulu, chaque participant•e reprend ses petites habitudes et tente des approches individuelles. Mais comme il n’y a aucune coordination, cela ne fonctionne pas non plus.
Avec ces exercices, les participants découvrent comment ils se positionnent par rapport à un challenge qui ne leur est pas coutumier. Certains vont se mettre en retrait, d’autres vont prendre le lead. Si plusieurs d’entre eux décident de mener le groupe en même temps dans des directions différentes, c’est assurément le chaos. Ils vont peu à peu prendre confiance et expérimenter l’importance d’œuvrer tous ensemble dans la même direction. En amont, ils doivent donc élaborer une stratégie, se coordonner, se réguler, communiquer.
Étant donné que l’on évolue dans un environnement VICA, qui change en permanence et dans un sens que l’on ne connaît jamais, inévitablement il y a toujours un écart entre ce que l’on a prévu et ce qui se passe réellement. Ils doivent donc s’ajuster en permanence, tout en s’écoutant les uns les autres. Ils vont ainsi apprendre par corps et non par coeur, c’est-à-dire qu’ils vont éprouver dans leur corps, leur chair, comment leur collectif fonctionne. Ça révèle leurs forces individuelles et collectives, et la manière dont ils peuvent mieux fonctionner ensemble pour atteindre leur objectif commun.
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Basé en Normandie, Christophe Riou propose son activité Leadersheep dans toute la France. Il propose trois options, allant de la demi-journée à deux jours complets.
En savoir plus : https://leadersheep-coaching.fr/
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